La Banque de France a mené une série de tests sur l’utilisation de la monnaie numérique de banque centrale (MNBC) interbancaire (dite “de gros”), une version dématérialisée de la monnaie émise par les banques centrales utilisée pour les transactions entre grandes institutions financières. Le 5 septembre dernier, elle a dévoilé les résultats de deux nouvelles expérimentations.
Utilisée exclusivement par les banques centrales et commerciales, la MNBC interbancaire facilite le règlement de transactions sur des actifs tokenisés, c’est-à-dire des actifs financiers transformés en jetons numériques circulant sur des technologies de registre distribué (DLT), comme la blockchain.
Selon la Banque de France, cette monnaie joue un rôle clé dans la préservation de la stabilité des marchés financiers. Toujours selon elle, l’usage des actifs privés (i.e. cryptoactifs ou stablecoins) pour ce type de transactions pourrait entraîner une “fragmentation des marchés par une multiplication non coordonnée de solutions de règlement”.
Dès 2020, la Banque de France a lancé un programme d’expérimentations en collaboration avec divers acteurs financiers, pour explorer les cas d’usage de la MNBC à l’échelle nationale et internationale. La Banque des règlements internationaux (BRI) indique que 93 % des banques centrales mondiales examinent également le potentiel de la MNBC (de détail et/ou de gros).
En décembre 2023, la Banque centrale européenne (BCE) a lancé un appel à expérimenter de nouvelles méthodes de règlement en MNBC pour des transactions sur des actifs tokenisés. Ces expérimentations visent à améliorer l’interopérabilité entre les services Target de l’Eurosystème et les plateformes DLT.
Récemment, la Banque de France a annoncé le succès de deux nouvelles expérimentations dans le cadre de ses tests sur la MNBC de gros, à l’aide de sa plateforme DLT propriétaire DL3S.
- Dans l’expérimentation Leonidas/DL3S, la plateforme Leonidas (issue du projet Spunta de l’Association Bancaire Italienne) gère les transactions en monnaie commerciale entre banques, tandis que DL3S s’occupe des règlements en monnaie de banque centrale. Le protocole d’interopérabilité Hash Time Locked Contract (HTLC) synchronise et sécurise ces paiements entre les deux systèmes.
- Dans l’expérimentation ONYX/DL3S, en partenariat avec JP Morgan, la plateforme ONYX traite des paiements tokenisés entre clients, et DL3S prend en charge les règlements finaux en monnaie de banque centrale, également coordonnés via le protocole HTLC.
La Banque de France a déjà mené à bien 7 des 19 tests prévus avec DL3S. Ces tests comprennent des opérations en réel sur une période limitée et des opérations fictives dans un cadre de test.
Depuis mai 2024, d’autres tests ont été effectués : par exemple, la Banque centrale autrichienne et BNP Paribas ont testé le règlement de titres via un mécanisme de livraison contre paiement (DvP). L’Autorité monétaire de Hong Kong a expérimenté des paiements internationaux en utilisant un mécanisme d’interopérabilité compatible avec Swift.
La MNBC de gros est généralement perçue comme un moyen efficace d’améliorer la sécurité et la rapidité des transactions interbancaires, notamment pour les paiements transfrontaliers. En revanche, la MNBC de détail suscite plus de controverses, surtout dans l’industrie crypto, où elle soulève des préoccupations concernant l’intervention des banques centrales dans un secteur traditionnellement décentralisé.
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