L’AMF sanctionne un Conseiller en Investissements Financiers (CIF) et ses dirigeants

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Dans sa décision du 5 novembre 2025, la Commission des sanctions de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a condamné un Conseiller en Investissement Financiers (CIF) et ses dirigeants à des amendes respectives de 300 000 €, 200 000 € et 2 millions d’euros. L’AMF a également interdit définitivement la profession de CIF pour la Société.

Les sanctions reposent sur des manquements répétés entre 2019 et 2024 concernant l’organisation interne, la gouvernance des produits, la gestion des conflits d’intérêts, le dispositif LCB-FT et la documentation réglementaire, révélant une absence de structures essentielles attendues d’un CIF.

Ci-après, une analyse des manquements constatés.

 

I. Organisation interne et dispositifs procéduraux

Système d’archivage et gestion documentaire

La décision souligne que le CIF n’a pas mis en place de dispositif d’archivage permettant de garantir la conservation des documents relatifs aux clients. Lors du contrôle, le CIF n’a pu fournir ni les versions papier ni les versions numériques des pièces demandées, révélant l’absence d’un outil sécurisé d’archivage conforme aux exigences de l’article L. 541-8 du code monétaire et financier.

Procédure de gouvernance des produits

La procédure fournie à l’AMF mentionnait une date « 1er octobre 2022 », alors que les métadonnées démontrent une création le 25 avril 2024, jour de son envoi. Le CIF ne disposait donc pas de procédure de gouvernance des produits entre le 1er janvier 2019 et le 24 avril 2024.

Les griefs relèvent également l’absence de mise en œuvre opérationnelle du dispositif : absence de définition d’un marché cible, absence de dossiers relatifs aux fournisseurs et absence de documentation concernant les sous-distributeurs.

Situation de conflits d’intérêts et absence de registre

La cartographie des conflits d’intérêts se limite aux critères minimaux de l’article 325-28 du RGAMF, sans prise en compte des spécificités de l’activité. Selon la poursuite, elle aurait dû intégrer les risques issus de relations commerciales, capitalistiques, familiales ou amicales.

Par ailleurs, des conflits d’intérêts potentiels n’ont pas été identifié dans le registré dédié :

  • Avance de 40 000 € : Une avance de la société W a été remboursée en compensant avec des commissions issues d’une cliente.
  • Lien avec la société V : Le CIF a structuré une émission obligataire pour V et l’a ensuite recommandée à ses propres clients (440 000 €) sans documenter le conflit d’intérêt.

 

II. Dispositif LCB-FT et documentation réglementaire CIF

Procédure LCB-FT et mise en œuvre

Le CIF n’a pas démontré l’existence d’une procédure LCB-FT avant le 25 avril 2024. La procédure transmise à cette date porte une date théorique de création en 2022 mais a été générée le jour de son envoi, selon les métadonnées.

La procédure prévoit une évaluation du risque LCB-FT avant chaque opération, fondée sur une cartographie des risques. Aucun élément ne permet d’établir que ces évaluations ont été réalisées, ni avant ni après le 25 avril 2024.

La décision conclut à l’absence de mise en œuvre opérationnelle du dispositif.

Il est reproché au CIF de ne pas avoir systématiquement collecté les pièces obligatoires.

Les dossiers clients ne comportaient pas tous de :

  • justificatifs d’identité,
  • justificatifs de domicile,
  • éléments relatifs à l’origine des fonds investis.

Obligations de vigilance

L’AMF ne relève pas d’éléments démontrant la réalisation :

  • de la vigilance initiale (KYC),
  • de la vigilance constante,
  • de mises à jour des informations.

Documentation réglementaire CIF

Le CIF n’a pas constitué les dossiers réglementaires obligatoires pour les onze clients CIF ayant souscrit sur la période examinée, en méconnaissance du 10° de l’article L. 541-8-1 du CMF.

Pour la période 2020-2023, l’AMF n’a reçu ni documents d’entrée en relation (ou des versions incomplètes), ni déclarations d’adéquation, ni lettres de mission, ni questionnaires de connaissances clients (pour certains absents, pour d’autres non conformes), ni documents relatifs à l’information précontractuelle et post contractuelle sur les coûts et les frais.

 

Conclusion

La décision met en évidence des manquements systémiques, couvrant à la fois l’organisation interne, la gouvernance des produits, la gestion des conflits d’intérêts et les obligations LCB-FT. L’ensemble des constats révèle une absence durable de dispositifs structurés et opérationnels, pourtant indispensables à l’activité de CIF. Cette affaire rappelle l’importance, pour les acteurs du secteur, de disposer de procédures établies, d’outils de contrôle effectifs et d’une documentation exhaustive, afin de répondre aux exigences réglementaires et de garantir la protection des investisseurs.

Source : https://www.amf-france.org/sites/institutionnel/files/private/2025-11/san-2025-10_0.pdf

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