Le 23 février 2023, la Cour des comptes a publié ses observations définitives sur l’évolution du dispositif français de lutte contre le blanchiment. Dans ce document, la Cour des comptes estime que la France dispose d’un dispositif « complet » et « robuste » mais que des améliorations sont possibles.
En effet, le blanchiment de capitaux représenterait environ 3% du PIB mondial et 1,3% de celui de l’Union européenne (UE). La Cour des comptes juge la coordination internationale insuffisante car certains pays ne se conforment pas aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI). Elle constate également que l’harmonisation des législations au niveau de l’UE est insuffisante mais elle note qu’un « nouveau paquet législatif européen » a été présenté en 2021 et qu’une nouvelle autorité européenne sera créée.
Concernant la France, bien que la Cour juge le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux complet, elle estime qu’il reste perfectible quant à son application. Le dispositif français repose en particulier sur l’assujettissement de différentes professions aux obligations de vigilance, le périmètre des assujettis étant plus large qu’ailleurs. Cependant tous les assujettis n’ont pas le même niveau de maturité et d’engagement dans la lutte contre le blanchiment de capitaux. Elle souhaiterait que les moyens d’action offerts par le cadre juridique français soient davantage exploités.
La Cour estime que le dispositif français « se situe plutôt en pointe en ce qui concerne la transparence et la traçabilité des flux » mais il doit encore s’améliorer sur le sujet des personnes politiquement exposées (PPE).
Elle pointe également du doigt certaines professions non financières qu’elle estime être « insuffisamment structurées » dans cette lutte. Bien que le nombre de déclarations de soupçons ait fortement augmenté autant pour les professions financières que non financières, elle estime que les professions d’agents immobiliers, de commerçants de métaux et pierres précieuses ainsi que les négociants d’antiquités ou d’œuvres d’art ne réalisent pas assez de déclarations de soupçons au regard des enjeux identifiés.
En outre, elle estime que l’efficacité du dispositif français reste difficile à mesurer et que les mesures mises en œuvre par les différents acteurs de la lutte contre le blanchiment devraient être analysées afin de connaître leurs coûts et leurs bénéfices.
La Cour a ainsi émis 7 recommandations dont 2 sont à destination de la Direction générale du Trésor (DG Trésor) tandis que les 5 autres sont pour le président du Conseil d’orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (COLB). Les recommandations sont les suivantes :
- La DG trésor devrait inciter le GAFI à lancer une réflexion sur l’encadrement des paiements en monnaie fiduciaire et des cartes prépayées ;
- La DG trésor devrait prendre un arrêté ministériel afin de fixer la liste des PPE ;
- Le COLB devrait définir un socle minimal de formation pour les agents des professions assujetties ;
- Le COLB devrait impliquer davantage les professions assujetties et les autorités et services répressifs dans ses groupes de travail thématiques ;
- Le COLB devrait assurer un suivi de la mise en œuvre du plan d’action interministériel avec des données plus précises. Il lui est également demandé de rédiger un rapport d’étape sur la conformité et l’efficacité du dispositif français de lutte contre le blanchiment ;
- Le COLB devrait approfondir les analyses des risques au niveau national, territorial et sectoriel et des schémas de blanchiment ;
- Enfin, le COLB devrait réfléchir à une utilisation plus complète de l’ensemble des données disponibles dans les administrations à des fins opérationnelles de lutte contre le blanchiment.
Source :
https://www.ccomptes.fr/system/files/2023-02/20230223-S2023-0017-Lutte-contre-le-blanchiment.pdf